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Tupolev Tu-128

Tu-128 "17 bleu" du 72 GvAP à Anderma en mai 1986, ravitaillé par un APA-5D.

Développement du Tu-28

En 1957, le maréchal Evgueniy Yakovlevitch Savitskiy, commandant de l'aviation de chasse de la PVO, demanda à Andreï Nikolaïevitch Tupolev de développer un intercepteur à partir du bombardier Tupolev Tu-98 alors à l'état de prototype. Tupolev confia cette tâche à Sergueï Yeger, le chef du département projet de l'OKB-156 (bureau d'étude Tupolev).

Une année durant, le développement de l'intercepteur à long rayon d'action qui reçu la désignation "maison" de Tu-128 se fit aux risques et périls de l'OKB-156. Ce n'est qu'en 1958 que les militaires approuvèrent le projet, donnant au Tu-128 une existence "légale". La désignation officielle proposée fut Tu-28. Le 4 juin 1958, le comité central du PCUS rédigea une directive ordonnant le développement du système d'armes Tu-28-80. l'appareil devait être propulsé soit par deux turboréacteurs AL-7F-2 de 11 100 kg de poussée développés par l'OKB-165 d'Arkhip Lioulka, soit par deux VD-19 proposés par l'OKB-36 de Vladimir Dobrynine. L'OKB-339 de Fyodor Volkov devait quant à lui fournir le radar RP-S Smertch, tandis que l'OKB-4 de Matous Rouvimovitch Bisnovat était responsable des missiles K-80 AAM (d'où le nom de Tu-28-80).

Lors du lancement officiel du programme, Dmitriy Sergueïevitch Markov en devint l'ingénieur en chef. Mais son implication dans d'autres programmes entraîna son remplacement par I.F. Nezval à l'été 1959. En juin 1959, l'OKB-156 présenta les premiers résultats du programme à la PVO, y compris les résultats des essais en soufflerie. La particularité du Tu-28 qui intéressa le plus la PVO était sa capacité à engager des cibles volant à des altitudes supérieures à la sienne grâce à ses missiles K-80. L'important rayon d'action de l'appareil fut également très apprécié des militaires : il devait être capable d'intercepter des cibles dans un rayon de 1500 km autour de son point de départ. L'équipage devait compter deux personnes pour faciliter la tâche du pilote. Pour la propulsion, ce sont les turboréacteurs AL-7F-2 qui furent retenus. Le radar Smertch ainsi que les missiles K-80 furent testés à bord d'un Tu-104A civil contre des drones cibles.

Deux photos du prototype Tu-28 lors des essais à Joukovski à la fin de l'année 1961. (crédits photos : V. B. Khazanov)

La construction du prototype du Tu-28 se fit durant les six premiers mois de l'année 1960. Le 12 juillet, l'appareil fut convoyé au centre d'essai Tupolev de Joukovski. Les essais de roulage débutèrent le 27 février 1961, tandis que le premier vol se déroula le 18 mars, avec M. V. Kozlov et K. I. Malkhasyan aux commandes. Les vols d'entraînement pour la participation de l'appareil au salon aérien de Touchino commencèrent le 23 juin 1961. C'est donc le juillet 1961 à Touchino que le nouvel appareil fut dévoilé au public, recevant à la même occasion son nom de code OTAN de Fiddler.

Le prototype passa ensuite les essais d'acceptation qui débutèrent le 20 mars 1962, avec les 4 premiers appareils de présérie produits par l'usine n°64 de Voronej, dont le premier fut livré au début de l'année 1961. Les tests démontrèrent que l'appareil n'atteignait pas la vitesse requise, mais une modification opportune permit de palier à cette insuffisance. Le 27 septembre 1962, le prototype du Tu-28 abattit ses premières cibles à savoir deux drone M-28 (IL-28 modifié). S'en suivirent plusieurs essais d'interception de drones et de bombardiers jusqu'en octobre 1963. Dès le 10 novembre 1962, la commission d'essai rendit un pré-rapport dans lequel elle préconisait le lancement de la production en série du Tu-28. Les essais d'acceptation prirent fin le 13 juillet 1964, après 40 mois de tests pour un total de 799 vols.

Trois photos du prototype Tu-28 conservé à Monino. Le numéro 0 peint sur le nez était noir à l'origine.
(créditis photos : Francisco José Jurado Ariza, Babaevskiy Slava & Flavien Breitenmoser)

Tupolev Tu-128

Le 12 décembre 1963, le ministère de la défense décida de rebaptiser le système d'armes Tu-128S-4, l'avion devenant ainsi le Tu-128 et les missiles embarqués étant rebaptisés R-4 (R-4R pour le missile à guidage radar et R-4T pour celui à guidage infrarouge). Finalement, le Tu-128S-4 fut officiellement inscrit à l'inventaire des forces armées soviétiques le 8 juin 1965, fournissant ainsi à l'Union Soviétique un intercepteur à long rayon d'action d'une grande efficacité.

Le troisième Tu-128 de présérie utilisé pour les essais d'acceptation à Akhtoobinsk.
(crédits photo : E. Y. Gordon)
Tu-128 "24 bleu" opérationnel.
Rare cliché de Tu-128 vu de dessus.
(crédits photo : G. F. Petrov)
Tu-128 "71 bleu" conservé au musée de Savasleïka.

L'usine n°64 livra 37 Tu-128 en 1966, et un total de 188 appareils entre 1962 et 1970. Le 148 TsBP i PLS de la PVO reçu son premier Tu-128 en 1964. La mise en service d'un simulateur de vol reproduisant le comportement de l'appareil facilita grandement la conversion des pilotes. Le 5 octobre 1965, 7 Tu-128 rejoignirent des unités de première ligne pour être pris en main par les pilotes. Entre mai 1967 et octobre 1968, l'unité de chasse de la PVO basée à Arkhangelsk-Talagi réalisa une évaluation de l'armement avec les 7 appareils susmentionnés. Au 1er août 1967, 64 Tu-128 avaient intégrées des unités de première ligne.

Tupolev Tu-128UT d'entraînement

Avant d'accepter la production en série du Tu-128, le commandement de la PVO demanda à Tupolev de réaliser une version triplace de l'appareil pour la formation des pilotes. Le Tu-128UT fut surnommé Pelikahn à cause de la forme de son nez contenant un troisième cockpit pour l'instructeur, abaissé pour offrir un meilleur champ de vision au pilote. Les deux premiers prototypes du Tu-128UT commencèrent leurs essais au début de l'année 1971, suivis tout de suite après par les deux autres prototypes. Les tests se révélant concluant, l'appareil fut inscrit à l'inventaire des forces armées le 14 septembre 1971. La même année, l'usine de Voronej produisit dix appareils de série se différenciant du prototype par la forme de leur dérive.

L'un des deux prototypes du Tu-128UT.
(crédits photo : E. Y. Gordon)
Tu-128UT de production. Remarquez la nouvelle forme de la dérive. Avec son troisième cockpit, le nez du Pelikahn a vraiment une allure singulière.

Tupolev Tu-128M

À la fin des années 1960, un programme d'amélioration en trois points du Tu-128S-4 fut lancé en partenariat avec la PVO. Il visait à réduire l'altitude minimale d'interception de 8000-10000 m à 500-1500 m, à augmenter l'altitude maximale d'interception de 21 000 m à 23 000-25 000 m et la vitesse maximale de la cible de 2000 km/h à 3000 km/h, et enfin à augmenter la vitesse maximale de l'appareil en charge de 1665 km/h à 2100-2400 km/h. Le 26 décembre 1968, le comité central du PCUS donna son accord pour le développement du système d'armes Tu-128S-4M, composé du Tu-128M doté d'un nouveau radar RP-SM Smertch-M et de nouveaux missiles R-4RM et R-4TM. Ces modifications visaient à répondre au premier point du programme d'amélioration.

En avril 1970, deux Tu-128 de production furent prélevés pour être transformés en prototypes du Tu-128M à l'usine n°64 de Voronej. Le premier appareil modifié fut livré en août 1970 et les essais d'acceptation démarrèrent en septembre, avec le premier vol du premier prototype du Tu-128M le 24 septembre. Après plusieurs séries de tests concluants, le Tu-128M fut inscrit à l'inventaire de la PVO le 28 juin 1979. Tous les Tu-128 alors en service furent modifiés aux standards du Tu-128M dans les ateliers de la PVO et restèrent en service jusqu'à la fin des années 1980.

Tu-128M "75 bleu". Les codes des unités de la PVO étaient très souvent inscrits en bleu. Tu-128M "43 beu".

Carrière opérationnelle

Au moment du développement du Tu-128, la PVO comptait équiper 25 régiments avec le nouvel appareil, mais en réalité seulement 6 régiments furent dotés de cet appareil. Trois de ces régiments avaient pour mission de protéger les bases de la Flotte du Nord, deux autres étaient basés en Extrême-Orient et le dernier au Kazakhstan. Les régiments basés dans le Grand Nord furent les plus actifs à cause de la présence permanente d'avions de reconnaissance occidentaux. Les Tu-128 prirent également part aux exercices Okeane menés par la flotte soviétique sur toutes les mers du globe. À une occasion, un Tu-128 survola par inadvertance l'espace aérien norvégien sans être inquiété par les défenses de l'OTAN.

Le Tu-128 demeure aujourd'hui le plus gros intercepteur jamais construit. Ses anciens pilotes se souviennent de cet appareil comme d'un excellent intercepteur, doté du meilleur système d'armes alors disponibles dans l'inventaire de la PVO.

De nombreux Tu-128 étaient basés dans le Grand Nord soviétique. Vue frontale d'un Tu-128 armé. Tupolev Tu-128UT "49 bleu".

Description technique

Le Tu-128 est un intercepteur lourd bimoteur. Il est fabriqué principalement en alliage d'aluminium V95 et en duralumin D16, tandis que les pièces moulées sont en alliage de magnésium ML25-74 et celles subissant les plus fortes contraintes sont en acier 30KhGSA et 30KhGSNA. Les panneaux sont assemblés par rivetage. Sur la plupart des Tu-128 sans suffixe, la découpe supérieure de l'empennage vertical est inclinée, alors qu'elle est horizontale sur les 15 derniers Tu-128 produits, sur les Tu-128UT de série et sur certains Tu-128M pour accueillir une antenne radio.

Le train tricycle est composé d'un train avant équipé de deux roues de 600x155 mm dépourvues de frein et de deux trains principaux équipés chacun de quatre roues de 800x225 m munies de freins à disque hydrauliques. Toutes les versions du Tu-128 sont propulsées par deux turboréacteurs Lioulka AL-7F-2 développant 6800 kgp à sec et 10 100 kgp avec réchauffe. Les 12 réservoirs internes de l'appareil contiennent 15 500 kg de kérosène. Les deux cockpits pressurisés du Tu-128 sont équipés de sièges éjectables KT-1. L'équipement de navigation comprend un système de navigation Pout-4P, un calculateur NVU-B1 et un système de pilotage automatique AP-7P. Le radôme de nez abrite un radar RP-S Smertch sur les Tu-128 et un RP-SM Smertch-M sur les Tu-128M. Les 4 pylônes d'aile APU-128 peuvent accueillir chacun un missile air-air Bisnovat R-4.

Détail de l'entrée d'air gauche du Tu-128. Détail du cockpit avec les canopées ouvertes, laissant voir les sièges éjectables KT-1.
Cockpit avant du Tu-128. Poste du navigateur du Tu-128.
Fiche technique
Tu-128 Tu-128M Tu-128UT
Longueur 30,06 m 30,06 m 30,58 m
Envergure 17,53 m 17,53 m 17,53 m
Hauteur au sol 7,15 m 7,15 m 7,07 m
Surface alaire 96,94 m2 96,94 m2 96,94 m2
Masse à vide 25 960 kg - 25 850 kg
Masse maximale au décollage 43 000 kg 43 260 kg 43 000 kg
Équipage 2 2 3
Motorisation 2 turboréacteurs Lioulka AL-7F-2 de 10 100 kgp chacun avec postcombustion 2 turboréacteurs Lioulka AL-7F-2 de 10 100 kgp chacun avec postcombustion 2 turboréacteurs Lioulka AL-7F-2 de 10 100 kgp chacun avec postcombustion
Plafond opérationnel 15 600 m 15 600 m 15 000 m
Vitesse maximale 1910 km/h à 11 000 m 1910 km/h à 11 000 m -
Distance franchissable 2565 km 2460 km 2230 km
Course au décollage 1350 m - 1350 m
Course à l'atterrissage 1050 m - 1050 m
Armement 2 missiles air-air R-4R, 2 missiles air-air R-4T 2 missiles air-air R-4RM, 2 missiles air-air R-4TM aucun
Profil du prototype Tu-28. Profil de Tu-128 de série. Profil de Tu-128UT de série.
Profil de Tu-128M. Plan 3 vues de Tu-128 porté au standard du Tu-128M mais conservant sa dérive d'origine. Tu-128M "45 bleu".
Sources :
  • Soviet Heavy Interceptors, Yefim Gordon, Midland Publishing, 2004
  • Ту-128, Ефим И. Гордон & Владимир Г. Ригмант, Авиация Время 2'97, 1997
Pour reproduire cet appareil :
Fabricant Échelle Référence et désignation
Amodel 1/72 72100 Tu-128 "Fiddler"
Amodel 1/72 72115 Tu-128UT Pelican
Page mise à jour le 21/04/2012