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T-80

T-80BV de la 4 GTD Kantemirovskaya défilant sur la Place Rouge pour célébrer les 60 ans de la Victoire, le 9 mai 2005.

Développement du T-80

En 1971, l'industrie soviétique commença le développement d'un nouveau char pour remplacer les T-64 et T-72 à partir du début des années 1980. Trois bureaux d'étude étaient en course : celui de Leningrad proposait l'Obiekt 225 propulsé par une turbine à gaz et l'Obiekt 226 à propulsion diesel plus classique, celui de Kharkov l'Obiekt 450 (T-74), tandis que celui de Tchelyabinsk travaillait sur l'Obiekt 780. La désignation des futurs chars fut modifiée en cours de route : celui de Leningrad devint l'Obiekt 258, celui de Tchelyabinsk l'Obiekt 785, et Kharkov proposa une modification de l'Obiekt 450 baptisée Obiekt 480. Mais des changements à la tête du bureau d'étude de Tchelyabinsk le poussèrent à abandonner le développement du nouveau char.

Maquette de l'Obiekt 450 (T-74) conservée au bureau d'étude de Kharkov.

L'idée de propulser un char avec une turbine à gaz comme sur les avions commença à faire son chemin en URSS à partir de 1949, sous l'impulsion de l'équipe menée par A. Starostenko du bureau d'étude Kirov de Leningrad. L'avantage principal de cette solution était sa puissance élevée pour un volume et une masse contenus. Par contre, la consommation d'une turbine était près de trois fois supérieure à celle d'un moteur diesel. De plus, l'environnement terrestre était bien plus défavorable que l'environnement aérien : il faudrait donc développer de nouveaux filtres à air pour protéger efficacement la turbine.

C'est au NPO Klimov de Leningrad, dirigé par Sergueï P. Izotov, que fut confié le développement d'une turbine à gaz adaptée à la propulsion d'un char de combat en juillet 1967. Le programme fut officiellement lancé par le décret gouvernemental du 16 avril 1968. La première turbine GTD-1000T de 1000 ch fut montée dans un char T-64A modifié en mai 1969, appelé Obiekt 219 sp.1. Mais les vibrations engendrées par la turbine sur le train de roulement fragilisaient ce dernier, c'est pourquoi l'Obiekt 219 sp.2 doté d'une suspension modifiée et de galets plus grands fut construit en 1970. Une soixantaines de chars expérimentaux furent produits entre 1968 et 1971 pour tester différentes configurations de suspensions et d'emménagement. Pour limiter l'ingestion de poussière, des jupes latérales en caoutchouc furent montées sur les garde-boue.

Profil de l'Obiekt 219 sp.1 de 1969. L'Obiekt 219 sp.2 de 1970 avec son nouveau train de roulement.

Les essais menés en 1972 et 1973 démontrèrent que la maniabilité du nouveau char était bien supérieure à celle du T-64, mais la turbine à gaz manquait de fiabilité. Fin 1972, seulement 19 des 27 turbines construites dépassaient les 300 heures de fonctionnement, alors que l'objectif à atteindre était 500 heures. Les tests réalisés au sein des bataillons du district militaire de la Volga en 1974-1975 confirmèrent également la consommation très élevée des turbines de l'Obiekt 219. En revanche, ce mode de propulsion ne nécessitait pas de préchauffage au démarrage à l'inverse des moteurs diesel. Mais en novembre 1975, le ministre de la défense, Andreï Gretchko, refusa de lancer la production de l'Obiekt 219 car il consommait deux fois plus de carburant que le T-64A.

L'arrivée de Dmitriy Oustinov à la tête du ministère de la défense en avril 1976 allait donner un nouveau souffle à l'Obiekt 219. Fervent défenseur de la turbine à gaz, Oustinov décida d'adopter ce nouveau char le 6 août 1976, sous le nom de T-80. Le projet de développement du T-74 fut par conséquent abandonné au profit du T-80.

T-80 (Obiekt 219)

La production du T-80 débuta en 1976 à l'usine LKZ (Leningradski Kirovski Zavod) de Leningrad, mais les défauts de jeunesse du nouveau blindé entrainèrent l'arrêt de la production dès 1978. Moins de 200 T-80 furent produits, ce char n'offrant en fait pas d'avancée par rapport au T-64A. Le T-80 était armé du canon de 125 mm à âme lisse 2A46-1 monté dans une tourelle presque identique à cele du T-64A. Pour assurer la précision du tir, le char était équipé d'un stabilisateur 2Э28М et d'un télémètre optique TPD-2-49.

L'un des premiers T-80 de production dont la tourelle dérivait de celle du T-64A.

T-80B (Obiekt 219R)

Puisqu'Oustinov voulait remplacer le T-64 par le T-80, il fallait absolument apporter des améliorations à ce dernier. C'est ainsi que vit le jour l'Obiekt 219R, doté d'un blindage céramique composite de nouvelle génération, offrant une protection équivalente à 550 mm d'acier sur l'avant de la tourelle. Cette dernière bénéficiait aussi des évolutions appliquées en 1976 au T-64B, à savoir un nouveau système de contrôle de tir 1A33 incluant le télémètre laser 1G42, le calculateur balistique 1V517 et le stabilisateur 2Э26М. De plus, son canon de 125 mm 2A46-2 était capable de tirer le missile antichar 9M112 Kobra. À partir de 1982, le canon des T-80B fut remplacé par le 2A46M-1 Rapira. Quant à la propulsion, elle fut tout d'abord assurée par la turbine SG-1000 de 1000 ch, remplacée en 1980 par la turbine GTD-1000TF de 1100 ch. Pour les transmissions, le T-80B est équipé d'un poste radio R-123M.

T-80B conservé au musée technique Vadim Zadorojniy près de Moscou.
(crédits photo : Vitaliy V. Kouzmine)
Vue arrière du T-80B conservé au musée Vadim Zadorojniy montrant l'orifice d'échappement de la turbine, protégé par une grille.
(crédits photo : Vitaliy V. Kouzmine)
T-80B conservé au Musée Central des Forces Armées de Moscou.
(crédits photo : Aymeric Lopez)
T-80B conservé au musée de l'artillerie de Saint-Petersbourg. Remarquez les lucarnes du conducteur juste sous le canon.
(crédits photo : Andreï Tihonov)
Détail de l'avant droit de la tourelle du T-80B de Saint-Petersbourg, montrant le phare de recherche infrarouge Louna L-4A à droite du canon.
(crédits photo : Andreï Tihonov)
Le tube monté à l'arrière de la tourelle du T-80B contient le schnorchel. (crédits photo : Andreï Tihonov)
Poste du tireur avec le télémètre laser 1G42 sur la droite et l'appareil de vision nocturne TPNZ-49 sur la gauche. La turbine à gaz GTD-1000TF propulsant les T-80B à partir de 1980. Détail de la tourelle d'un T-80B montrant les pots fumigènes 902B Toutcha, le télémètre laser 1G42 au centre et le viseur nocturne TPNZ-49 en retrait, sur la droite.

En 1978, l'armée soviétique déclara l'Obiekt 219R bon pour la production en série en tant que T-80B. L'usine LKZ lança la production dès cette année, tandis que l'usine d'Omsk passa du T-55A d'export au T-80BK de commandement (Obiekt 630) en 1979. Le T-80B fut le plus produit des T-80 et commença à équiper les divisions basées en RDA en 1981. En novembre 1990, on dénombrait 3518 T-80B en service à l'Ouest de l'Oural, plus 217 T-80BK de commandement.

T-80B lors d'un exercice dans le district de Leningrad en 1989. T-80B en transfert vers la RDA en 1989.
(crédits photo : US DoD)

T-80BV (Obiekt 219RV)

Le T-80BV (ou Obiekt 219RV) est une version du T-80B dotée de briques de blindage réactif (ERA pour Explosive Reactive Armor) Kontakt. Ces briques sont formées d'explosif entouré d'un blindage léger, le but étant de faire exploser le projectile ennemi avant que celui-ci n'atteigne le blindage proprement dit. Le dispositif Kontakt commença à être appliqué sur les T-80B en 1983, mais la production du T-80BV à l'usine LKZ ne débuta officiellement qu'en janvier 1985. Lors de leur passage en usine, certains T-80B furent à leur tour équipés de briques Kontakt. En novembre 1990, les forces soviétiques à l'Ouest de l'Oural comptaient 594 T-80BV dans leur rangs, plus 23 T-80BVK de commandement.

Privé de ses briques de blindage Kontakt, ce T-80BV laisse voir tous les points d'ancrage prévus pour celles-ci. T-80BV d'une unité de la garde.
T-80BV en gare de Berlin-Lichtenberg en septembre 1994. Sur cette photo de 1991, le tube d'air frais d'un T-80BV appartenant au SGV est en cours de montage, tandis que le tube d'échappement est déjà en place à l'arrière.

T-80U (Obiekt 219AS)

Pour répondre à l'arrivée de nouveaux projectiles à pénétration de type APFSDS au sein des armées de l'OTAN, le NII Stali développa un nouveau blindage réactif dénommé Kontakt-5, qui était intégré au blindage traditionnel à la différence des briques Kontakt. Ce nouveau blindage réactif fut appliqué à l'Obiekt 219AS, qui bénéficiait aussi d'une tourelle modifiée et protégée par un nouveau blindage, du système de contrôle de tir 1A45 Irtych (télémètre 1G46, calculateur balistique digital, stabilisateur 2Э42, viseur du chef de char PKN-4S et viseur nocturne TPN-4 Bourane-PA) et pouvait tirer le missile 9M119 Refleks. À la fin de l'année 1983, une présérie de 10 Obiekt 219AS fut produite pour mener à bien les essais. Le nouveau char fut accepté en 1985 en tant que T-80U et sa production commença à Omsk et à l'usine LKZ de Leningrad. L'usinen°45 de Kharkov produisit aussi 45 T-80U avant de passer au T-80UD.

À partir de 1990, la turbine à gaz GTD-1000TF fut remplacée sur les T-80U par la nouvelle GTD-1250 développant 1250 ch. En novembre 1990, 410 T-80U avaient été livrés aux forces soviétiques déployées à l'Ouest de l'Oural.

T-80U en plein "vol" lors d'une démonstration près de Yekatenribourg en 2000.
(crédits photo : Steven J. Zaloga)
T-80U de la 4 GTD Kantemirovskaya équipé de schnorchel pour traverser un cours d'eau.
(crédits photo : D. Pitchouguine)
La dernière turbine développée pour le T-80U, la GTD-1250 de 1250 ch.
T-80U à l'entrée du salon international de défense de Moscou.
(crédits photo : Youriy Pacholok)
Vue arrière du T-80U exposé au salon international de défense de Moscou.
(crédits photo : Youriy Pacholok)
Détail de l'orifice d'échappement de la turbine GTD-1250 du T-80U.
(crédits photo : Youriy Pacholok)

T-80UD (Obiekt 478B)

Le manque de fiabilité, le coût de production et la consommation excessive des turbines à gaz poussèrent les autorités soviétiques à développer une version du T-80 propulsée par un moteur diesel. Dès 1975, l'usine de Kharkov plancha sur le sujet avec son Obiekt 478, utilisant le moteur diesel 6TD de 1000 ch développé à partir de 1966. La mort d'Oustinov en décembre 1984 permit à l'usine n°45 de Kharkov d'obtenir l'accord du gouvernement le 2 septembre 1985 pour lancer la production d'un T-80U diesel. Cinq prototypes du char, renommé Obiekt 478B Berioza, furent achevés avant la fin de l'année, et le gouvernement donna son accord pour lancer la production en 1986 sous l'appellation T-80UD. Le T-80UD fut inscrit à l'inventaire de l'armée soviétique en 1987. Environ 500 T80-UD furent produits avant la chute de l'URSS en 1991, et la première apparition public du nouveau char (et par la même occasion du T-80 toutes versions confondues) eut lieu à l'occasion du défilé de la Victoire le 9 mai 1990.

Le T-80UD se distinguait extérieurement du T-80U par la forme de son échappement et par l'affût de sa mitrailleuse antiaérienne, contrôlable à distance. Le blindage réactif intégré Kontakt-5 ne fut installé sur le T-80UD qu'à partir de 1988, les chars de début de production étant recouverts de briques Kontakt.

Le moteur diesel 6TD de 1000 ch propulsant le T-80UD. T-80UD lors d'un exercice dans le district militaire de Moscou en avril 1989. T-80UD passant devant le Ministère de l'Industrie pour gagner la Place Rouge à l'occasion du défilé du 9 mai 1990.
T-80UD au polygône de tir de Golovenki le 6 septembre 2001. T-80UD conservé à l'école militaire Souvorov de Moscou.
(crédits photo : Vitaliy V. Kouzmine)
Vue arrière du même char pemrettant de l'échappement du moteur 6TD.
(crédits photo : Vitaliy V. Kouzmine)

Le T-80 après la chute de l'URSS

Lors du démembrement de l'URSS, au moins 4874 T-80 se trouvaient déployés à l'Ouest de l'Oural. La grande majorité d'entre eux fut récupérée par l'armée russe et rapatriée vers la Russie depuis les anciens pays de l'Est. Le manque de financement allait obliger les forces russes à choisir entre la production du T-80U à Omsk et celle du T-72B à Nijni-Tagil. En 1996, l'armée russe opta finalement pour le T-90, version modifiée du T-72B, même si le T-80 forme encore le gros des divisions blindées russes, avec plus de 3000 exemplaires en service en 2008. En revanche, l'usine de Kharkov, en Ukraine, continue de produire le T-80UD, rebaptisé T-84, pour l'export. En 2009, le T-80BV équipait deux brigades de l'infanterie de marine.

Le T-80 participa à la première guerre de Tchétchénie en 1994. Pour l'assaut sur Grozny le 31 décembre 1994, 200 T-72 et T-80 aux mains d'équipages inexpérimentés n'ayant jamais reçu de formation sur le T-80 furent lancés dans la ville sans préparation préalable. Au final, 70% d'entre eux furent détruits, et même si le T-80B était bien protégé face aux lance-roquettes RPG-7, sa plage moteur à l'arrière était particulièrement vulnérable aux tirs provenant du haut, ce qui explique le résultat de cet assaut bâclé. De plus, nombre de défenseurs de Grozny étaient des vétérans de la guerre d'Afghanistan. Enfin, la plupart des chars employés n'avaient pas été dotés de leur blindage réactif. Après cet échec, le T-80 ne fut plus utilisé pour prendre une ville.

T-80BV en position dans les environs de Chatoï, en Tchétchénie, le 18 décembre 1995. T-80BV du 81 GMP de retour de Tchétchénie, avril 1995. T-80U de la 4 GTD Kantemirovskaya lors de la parade du 9 mai 1995 à Moscou.
Fiche technique
T-80 T-80B T-80U T-80UD
Longueur du châssis 6982 mm 6982 mm 7400 mm -
Longueur hors tout 9456 mm 9651 mm 9556 mm 9690 mm
Largeur 3525 mm 3585 mm 3603 mm 3755 mm
Hauteur 2300 mm 2219 mm 2215 mm 2285 mm
Garde au sol 459 mm 451 mm 431 mm 515 mm
Poids en ordre de combat 42 000 kg 42 500 kg 46 000 kg 46 000 kg
Équipage 3 3 3 3
Moteur Turbine à gaz GTD-1000T, développant 1000 ch Turbine à gaz GTD-1000TF, développant 1100 ch Turbine à gaz GTD-1000TF, développant 1100 ch (avant 1990)
Turbine à gaz GTD-1250, développant 1250 ch (à partir de 1990)
6TD diesel 6 cylindres, développant 1000 ch
Vitesse maximale 70 km/h sur route 70 km/h sur route 65 km/h sur route 60 km/h sur route
Autonomie - 335 km sur route
440 km avec réservoirs externes
335 km sur route
440 km avec réservoirs externes
-
Emport en carburant - - - -
Protection - équivalent à 550 mm sur le glacis de la tourelle
équivalent à 500 mm à l'avant
équivalent à 780 mm sur le glacis de la tourelle -
Armement 1 canon de 125 mm 2A46-1 (38 coups), 1 mitrailleuse coaxiale de 7,62 mm (1250 coups) et 1 mitrailleuse NSVT de 12,7 mm Outyos (450 coups) sur la tourelle 1 canon de 125 mm 2A46-2 (38 coups) jusqu'en 1982, 1 canon de 125 mm 2A46M-1 Rapira (38 coups) à partir de 1982, 1 mitrailleuse coaxiale de 7,62 mm (1250 coups) et 1 mitrailleuse NSVT de 12,7 mm Outyos (450 coups) sur la tourelle 1 canon de 125 mm 2A46M-1 Rapira (45 coups), 1 mitrailleuse coaxiale de 7,62 mm (1250 coups) et 1 mitrailleuse NSVT de 12,7 mm Outyos (450 coups) sur la tourelle 1 canon de 125 mm 2A46M-1 Rapira (45coups), 1 mitrailleuse coaxiale de 7,62 mm (1250 coups) et 1 mitrailleuse NSVT de 12,7 mm Outyos (450 coups) sur la tourelle
Profil d'un T-80BV. Plan 3 vues d'un T-80UD. T-80B, district militaire de Leningrad, 1989.
T-80UD de la 4 GTD Kantemirovskaya, Moscou, octobre 1993. T-80BV stationné en Allemagne en janvier 1994. T-80BV du 81 GMP en Tchétchénie, 1995.
Sources :
  • T-80 standard tank, Steven J. Zaloga, Osprey New Vanguard n°152,2009
  • Main battle tank T-80, Mikhail Baryatinskiy, Russian Armour volume 3, Ian Allan Publishing, 2007
  • Танк Т-80, Михаил Барятинский, Танкомастер, 2002
  • site de Vitaliy Kouzmine
Pour reproduire ce véhicule :
Fabricant Échelle Référence et désignation
Revell 1/72 03104 T-80B
Revell 1/72 03106 T-80BV
Zvezda 1/35 3592 T-80BV with ERA
Revell 1/35 03079 Russian main battle tank T-80 UD
Skif 1/35 201 T-80UD Bereza
Dragon/DML 1/35 3505 T-80 MBT
Page mise à jour le 21/04/2012