Le Tupolev Tu-95 n'a pas été conçu spécifiquement pour les besoins de l'aviation navale, aussi trouverez vous tous les détails sur sa conception et ses différentes variantes ici.
Les qualités uniques du Tu-95M en faisaient une machine exceptionnellement bien adaptée pour des patrouilles au-dessus des étendues immenses de l'Océan Pacifique. L'autonomie extraordinaire du Tu-95 et sa capacité d'explorer un espace considérable en très peu de temps convainquirent les militaires d'en commander une version spéciale adaptée à la reconnaissance. C'est la directive du 20 mai 1960 du Conseil des Ministres de l'URSS qui sanctionna ce besoin.
Le Tu-95M n°7800410 fut envoyé à l'usine de Kouïbychev pour y recevoir ses équipements de reconnaissance photographique et électronique et une perche de ravitaillement, devenant ainsi le premier Tu-95MR. Sa conversion fut terminée à l'automne 1964 et ses essais prirent fin le 19 décembre 1964. Après lui, 3 autres Tu-95M furent convertis en Tu-95MR ; il s'agissait des Tu-95M n°7800501, 7800502 et 7800506. Ce dernier ne fut pas équipé de perche de ravitaillement. Le nom de code attribué au Tu-95MR par l'OTAN était Bear-E.
La marine soviétique mit en service, à partir de la seconde moitié des années 1950, des sous-marins entièrement nouveaux, armés de missiles mer-mer P-6. Pour accroître l'efficacité de cette nouvelle arme, il fallait lui adjoindre des avions de reconnaissance lointaine capables d'identifier les cibles éventuelles, et de donner leur position précise. Le Tu-95K était tout indiqué pour cette mission à laquelle le Tu-95MR ne convenait pas aussi bien : le bureau d'études de Tupolev commença donc en 1959 à étudier une nouvelle version du Tu-95, le Tu-95RTs (pour Разведчик-Целеуказатель, Reconnaissance - acquisition de cibles).
Le premier prototype du Tu-95RTs, obtenu à partir d'un Tu-95M modifié, commença ses essais en automne 1962. Le Tu-95RTs était équipé d'un radar Ouspekh placé sous son ventre, permettant d'observer la surface de la mer, qui le différenciait facilement des Tu-95M et Tu-95MR. Avant la fin des essais d'acceptation en décembre 1964, l'usine n°18 de Kouïbychev débuta la production du Tu-95RTs. Entre 1963 et 1969, 53 exemplaires de cette version furent produits. Le Tu-95RTs codé "17 noir" fut le seul à être équipé d'un brouilleur SPS-151 à la place de la tourelle arrière.
Le Tu-95RTs commença à équiper les unités de l'AVMF en 1964, bien qu'il ne soit officiellement inclus à l'inventaire des forces de l'aviation navale soviétique que le 30 mai 1966. L'OTAN lui attribua le nom de code Bear-D. La première unité opérationnelle à recevoir le Tu-95RTs fut le 392 ODRAP de la Flotte du Nord en 1964-1965. Le 4 septembre 1965, le 867 ODRAP de la Flotte du Pacifique basé à Khorol commença sa conversion sur Tu-95RTs. Le 15 juillet 1971, l'unité fut rebaptisée 304 GvODRAP.
Les Tu-95MR et Tu-95RTs de l'aviation navale furent les premiers Tu-95 desquels les forces aériennes des pays de l'OTAN purent s'approcher. Pendant la crise de Cuba, et longtemps après, les Tu-95MR (et plus tard les Tu-95RTs) effectuèrent régulièrement des reconnaissances sur les flottes militaires américaines dans l'Atlantique. Le commandement soviétique fut ainsi constamment informé des mouvements de la flotte américaine sur les routes d'accès à Cuba ; les vols au-dessus des atterrages des États-Unis ne furent pas rares.
Les Tu-95K, Tu-95KM et Tu-95K-22 furent aussi largement utilisés pour des reconnaissances lointaines, complétant le travail des Tu-95MR et Tu-95RTs. Ces missions de reconnaissance ont fini par constituer l'activité principale des Tupolev Tu-95.
Tu-95RTs "21 noir" du 392 ODRAP de la Flotte du Nord de retour de mission.
(crédits photo : www.fedotovoruhelpc.ruhelp.com) |
Tu-95RTs "escorté" par des F-14A.
(crédits photo : US Navy) |
Tu-95RTs du 392 ODRAP photographié en 1983.
(crédits photo : US Navy) |
Aucune manoeuvre navale de l'OTAN ne se déroula sans que des Tu-95RTs y participassent en qualité "d'invités" ou de.... "photographes de presse". Les Occidentaux ne pouvaient pas interdire à ces indiscrets d'observer sans commettre un acte de guerre ; ils ne pouvaient que tenter de limiter leur capacités d'observateur. Très souvent, au cours de ces missions, les Tu-95 rencontrèrent les avions de chasse de l'OTAN qui n'avaient alors qu'une seule mission ; se placer sous le ventre du Tu-95 pour masquer ses caméras. Après de nombreuses rencontres, la presse occidentale commença à publier des photos du Tu-95, qui devint ainsi le symbole de "l'agressivité" soviétique.
Les Tu-95 navals accomplirent un travail remarquable. Dans les années 1979-1980, plusieurs Tu-95RTs du 304 GvODRAP basés à Danang, au Viêtnam, allèrent patrouiller au-dessus de l'Océan Indien et du secteur du sud-est de l'Océan Pacifique. D'autres Tu-95 décollèrent de bases aériennes à Cuba, en Guinée (1973), en Angola (1977), et même en Lybie, en Ethiopie et en Somalie. Les Tu-95RTs restèrent en service jusqu'en 1993.
Tu-95MR | Tu-95RTs | |
---|---|---|
Longueur | 48,5 m | 48,5 m |
Envergure | 50,04 m | 50,04 m |
Hauteur au sol | 12,5 m | 12,5 m |
Surface alaire | 283,7 m2 | 283,7 m2 |
Masse à vide | - | - |
Masse maximale au décollage | 182 000 kg | 182 000 kg |
Équipage | 9 | 9 |
Motorisation | 4 turbopropulseurs NK-12MV de 15 000 ch chacun | 4 turbopropulseurs NK-12MV de 15 000 ch chacun |
Plafond opérationnel | 11 900 m | 10 300 m |
Vitesse maximale | 910 km/h | 910 km/h |
Distance franchissable | 13 120 km | 13 460 km |
Course au décollage | 1800 m | - |
Course à l'atterrissage | 1500 m | - |
Armement | 6 canons AM-23 de 23 mm (2500 coups) | 6 canons AM-23 de 23 mm (2500 coups) |
Page mise à jour le 21/04/2012